[hammett]

Un article du quotidien Les Echos (section payante).

Google négocierait un droit de passage prioritaire sur Internet

L'ogre Google aimerait bien que ses services sur Internet passent avant ceux de ses concurrents ! Le moteur de recherche le plus utilisé au monde aurait entamé des discussions en ce sens avec les grands fournisseurs d'accès à Internet (FAI) aux Etats-Unis, tels que Comcast ou ATT, selon « The Wall Street Journal » d'hier. L'entreprise de la Silicon Valley chercherait à obtenir des opérateurs que ses contenus passent en priorité sur leurs réseaux qui frisent la saturation, moyennant finance bien sûr...

Hier, Google se contentait de clamer son attachement à la « neutralité de l'Internet », c'est-à-dire au fait que tous les contenus sur les réseaux soient accessibles au même débit. Mais comme il n'y a pas de fumée sans feu, la « blogosphère » est déjà en ébullition. Il faut dire que l'enjeu est majeur pour tous les internautes : il s'agit de savoir si, à l'avenir, chacun pourra surfer à sa guise, en ayant accès aux sites qu'il veut, à la vitesse qu'il souhaite...

Jusqu'ici, la neutralité de l'Internet a toujours prévalu, à de rares exceptions près. Neuf Cegetel avait bien coupé l'accès à Dailymotion quelques jours en 2007, estimant que la bande passante consommée était supérieure à ce qu'il pouvait fournir. Comcast avait aussi tenté d'empêcher ses abonnés de recevoir des fichiers BitTorrent, c'est-à-dire des films ou de la musique piratés, mais le régulateur américain lui a infligé une amende cet été.

Distorsion de concurrence
Si elle se confirme, l'information d'hier marquerait un tournant, car si Google peut payer pour que les courriels de ses clients ou les vidéos de son site YouTube soient accessibles en priorité, de petits fournisseurs de contenus - comme DailyMotion par exemple - n'auront eux pas les moyens de se rendre aussi attractifs aux yeux des opérateurs. Ce qui pourrait créer une distorsion de concurrence, voire une barrière à l'entrée. Pour prendre un exemple concret, c'est un peu comme si BMW acceptait de payer aux autoroutes Paris-Rhin-Rhône un droit de passage permettant à ses voitures de rouler sur une file réservée à 180 kilomètres/heure... Que feraient alors Renault ou PSA ?

Tôt ou tard, la question va donc se poser sur Internet. « On ne peut pas diffuser YouTube en haute définition à tout le monde en même temps. Il va donc falloir choisir des priorités », remarque un responsable de France Télécom. En France, Paul Champsaur, le président de l'Autorité de régulation des télécommunications (Arcep), soulignait récemment que « l'imposition du principe de neutralité déséquilibre la relation entre fournisseurs de contenus et opérateurs de réseaux au détriment de ces derniers qui risquent de ne plus avoir les moyens de financer les investissements nécessités par l'évolution technologique [par exemple, le très haut débit, NDLR] ». Le gendarme des télécommunications aimerait donc que les fournisseurs de contenus participent au financement des réseaux à très haut débit.

Une sorte de droit de passage tel que l'envisage Google est l'une des possibilités pour aider les opérateurs à investir les milliards qu'ils vont devoir débourser dans la fibre optique. Mais les internautes attachés au principe de « neutralité » du Web risquent de ne pas apprécier.
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